Les défis de l'observation en mathématique
Ce billet est étiqueté à la compétence cinq et onze.
Dans le cadre du cours MAT1026, nous avons réalisé un travail très pertinent sur l'observation en mathématiques. Ce travail m'a permis de développer ma cinquième compétence professionnelle, puisqu'il s'agissait principalement d'évaluer les performances mathématiques d'un enfant de cinq ans à partir d'observations seulement.
Extrait du travail remis dans le cadre du cours MAT1026
Le 18 septembre 2018, nous avons réalisé une entrevue sur le concept du nombre avec un garçon nommé Balthazar. Âgé de 5 ans, il vient de commencer la maternelle dans une école à Montréal. À la suite de cette entrevue, nous sommes en mesure d’établir le domaine numérique de l’enfant ainsi que ses forces et ses faiblesses. D’abord, Balthazar est capable de compter jusqu’à environ quarante-cinq. Il est particulièrement à l’aise de raisonner mathématiquement avec des nombres allant de dix à vingt. La première force de Balthazar est l’utilisation de la stratégie de pointage. Il sait que celle-ci est une stratégie intéressante lorsqu’il doit compter un grand nombre de bâtons ou jetons et il l’utilise correctement. Du côté des faiblesses, nous avons remarqué une lacune au niveau de la conservation du nombre. En effet, Balthazar doit toujours recompter les bâtons si on les déplace sur la table ou si on les brasse dans nos mains devant ses yeux, malgré qu’il les a tous comptés une première fois. Bref, à la suite de notre entrevue, nous avons été agréablement surprises par l’aisance du petit Balthazar vis-à-vis nos questions mathématiques.
Rapport d'observation
Lors de notre entrevue avec Balthazar, il nous a été facile de repérer des stratégies semblables à celles observées chez les jeunes enfants dans la vidéo sur le concept de nombre.
D’abord, en analysant l’enregistrement de la vidéo, nous remarquons que le principe d’ordre stable de la comptine n’est pas complet chez Balthazar. En effet, à chaque fois qu’il répondait à une question, il devait réciter à voix haute la comptine numérique. Par exemple, Virginie a mis 9 jetons sur la table. Balthazar les a comptés un à la suite de l’autre en les pointant. Elle lui a demandé : « Combien y a-t-il de jetons sur la table? ». Au lieu de répondre «Il y en a neuf », Balthazard a récité la comptine : « Il y en a 1-2-3-4-5-6-7-8-9. » Cela montre que le principe d’ordre stable de la comptine n’est pas tout à fait complet, car Balthazar pense que le chiffre neuf existe seulement dans la comptine et non comme un chiffre à lui seul. Par la suite, nous pouvons citer un autre exemple concernant le principe de l’ordre stable. Quand Virginie a mentionné à Balthazar qu’elle retirait un jeton, elle lui a demandé de dire combien il en restait sur la table et celui-ci a dû recompter d’un à huit pour comprendre qu’il restait huit jetons sur la table plutôt que d’expliquer que huit vient avant neuf. Cela montre aussi une lacune au niveau du sens ordinal. Balthazar connait bien la comptine numérique. Par contre, il ne comprend pas tout à fait l’ordre des nombres, car il a besoin de réciter la comptine comme une chanson afin de répondre à la question. Il ne peut pas simplement dire « la réponse est huit, car c’est le nombre qui précède neuf. »
Ensuite, le concept de la conservation du nombre n’est pas acquis chez Balthazar. Au début de l’entrevue, Dominique a mis dix bâtons sur la table et elle les a fait compter par Balthazar. Une fois qu’il a donné sa réponse, elle a brassé les bâtons devant lui et les a déposés sur la table à nouveau. Elle lui a posé la même question : « Maintenant, combien y a-t-il de bâtons sur la table? ». Balthazar a dû compter les bâtons un à un malgré qu’il venait juste de le faire afin d’être capable de répondre à la question. Ici, le concept de la conservation du nombre est affecté, car l’enfant ne comprend pas que même si l’on déplace ou brasse les bâtons, le nombre restera le même.
Puis, nous avons remarqué quelques lacunes au niveau du principe d’abstraction lors de l’entrevue. D’une part, lorsque nous lui avions présenté des petits cartons et des jetons, nous lui avions demandé quel groupe en avait le plus. Il nous a répondu instinctivement qu’il y avait plus de carrés que de jetons sans les compter, car ils étaient plus gros et éparpillés sur la table contrairement aux jetons. On parle du principe d’abstraction, car il mettait son attention sur le fait que les cartons occupent un plus grand espace que les jetons qui sont plus petits. D’autre part, nous avons utilisé des jetons qui, derrière chacun d’entre eux, avaient une image de fruit. On remarque dans la vidéo que Balthazar prend un moment pour retourner les jetons et les dessins de fruits sont alors découverts. Lors d’une question, Sarah lui avait demandé de mettre autant de jetons que de bâtons, mais il avait compris qu’il fallait regrouper les jetons selon les dessins de fruits et les compter. On remarque qu’il s’est donc concentré sur les groupes de fruits et non sur l’ensemble des jetons. Cela fait référence au principe d’abstraction, car il a regroupé tous les jetons qui avaient une caractéristique semblable (les fruits) et parce qu’il n’a pas pris en compte que nous parlions de la totalité des jetons.
Finalement, nous avons observé que Balthazar utilise fréquemment deux stratégies pendant l’entrevue. D’abord, chaque fois que nous demandions à Balthazar de compter les bâtonnets ou les jetons, il les prenait dans ses mains et les plaçait de façon précise. Il les place un à la suite de l’autre avec un écart d’environ un pouce. Balthazar utilise cette stratégie afin d’éviter les erreurs de comptage. À maintes reprises, il a tenté d’utiliser la reconnaissance globale, mais, plutôt, il a subitement abandonné pour compter. Il se justifiait en disant « Ah! finalement je vais compter pour ne pas me tromper ». De plus, Balthazar utilise la stratégie de pointage. Une fois qu’il a placé les bâtons de façon stratégique, il les pointe un à un en récitant la comptine numérique. Cette stratégie n’est pas totalement acquise, car il s’est trompé à deux reprises lors de l’entrevue. Effectivement, nous avons remarqué un manque de coordination lorsqu’il effectuait son comptage à l’aide de la comptine. Les bâtons pointés ne correspondaient pas aux chiffres appropriés. Balthazar ne met pas son doigt vis-à-vis le bâton qui correspond au bon nombre. Donc, la stratégie de pointage doit encore être travaillée avec Balthazar afin d’assurer une bonne coordination entre le pointage et la comptine.
Activité
À la suite de l’entrevue, plusieurs activités pourraient être proposées à l’enfant pour poursuivre le développement des principes exploités précédemment. Puisque Balthazar avait plus de difficulté avec le concept de conservation du nombre, nous avons pensé retravailler cette notion avec lui à l’aide d’un exercice ludique. Pour ce faire, nous pourrions donner à Balthazar une feuille blanche avec trois images de la même araignée, mais sans ses pattes. La consigne serait de dessiner 10 pattes sur chaque araignée, mais disposées de façons différentes sur chacune d’entre elles (ex : 6 pattes d’un côté et 4 de l’autre). Par la suite, il devrait compter combien il y a de pattes sur chacune des trois araignées afin qu’il comprenne que chacune d’entre elles contient 10 pattes même si elles sont placées de façons différentes. On pourrait refaire l’activité plusieurs fois avec des nombres différents, soit de plus en plus grands, pour augmenter la difficulté de l’exercice. On pourrait aussi changer d’animal et opter pour des pois qu’il aurait à placer sur les ailes d’une coccinelle par exemple.
Réflexion individuelle (compétence 11)
Outre la question du temps, pourquoi est-ce difficile d’observer/évaluer ?
En effectuant cette analyse, je remarque une difficulté en particulier reliée à l’observation et à l’évaluation. Il peut être difficile pour l’évaluateur de rester neutre et objectif tout au long de l’entrevue. En effet, celui-ci doit tenter d’être neutre lors de ses interventions et de ses relances avec l’enfant. L’évaluateur ne doit pas encourager les réussites de l’enfant observé. Cela peut s’avérer à être une tâche assez complexe, car en tant qu’enseignant, il arrive d’être très enthousiaste vis-à-vis la réussite de nos élèves. Ensuite, une difficulté pour l’observateur est d’assumer complètement son rôle de second plan. Il ne doit pas intervenir ou interrompre pendant l’entrevue de son coéquipier. Cette tâche peut être ardue pour certains, car il est possible de vouloir instinctivement corriger les propos de son partenaire ou bien d’ajouter une idée nouvelle. Il doit réellement se mettre à l’écart et analyser les gestes et les paroles de l’enfant.
Que retenez-vous de l’observation de votre co-équipier/ère ?
En visionnant l’enregistrement de notre entrevue, je remarque que Virginie pose suffisamment de questions variées. Elle utilise beaucoup de nombres différents afin de voir si Balthazar est à l’aise avec un grand éventail. De plus, elle est capable d’être neutre. Elle donne ni encouragement verbale ni expression faciale positive ou négative. Par contre, je remarque qu’à quelques reprises, lorsque l’enfant donne une mauvaise réponse, elle reformule ses propos afin que l’enfant remarque son erreur et qu’il change sa réponse. Par exemple, elle demande à Balthazar combien de bâtons il y a au total sur la table (il y en a 16), il répond 5. Virginie relance avec : « Il y a 5 bâtons au total sur la table… ? » avec un ton de voix laissant croire à l’enfant qu’il a fait une petite erreur d'inattention.
Du côté de Sarah, je remarque qu’elle amène plus loin le raisonnement chez l’enfant grâce à l’utilisation de plusieurs relances comme : « Comment le sais-tu? » ou « Pourquoi fais-tu cela?». Elle semblait être bien préparée et elle était en maîtrise de ses questions. Cela est bénéfique pour le bon déroulement de l’entrevue, car elle sait comment bien faire les liens entre ses questions. Par contre, je remarque que Sarah avait quelques difficultés à rester neutre pendant qu’elle jouait le rôle d’observateur. Elle acquiesce avec la tête et elle fait quelques sourires lorsque Balthazar réussit à répondre correctement aux questions.
Que retenez-vous de l’observation de votre propre performance ?
Pour l’observation de ma propre performance, je remarque plusieurs aspects à améliorer en vue du deuxième travail. D’abord, il m’était difficile de jouer le rôle d’observateur à cause de mes lacunes quant à mes connaissances du développement du concept du nombre chez les jeunes enfants. Comme je n’ai eu qu’un ou deux cours à mon actif, je ne connais pas encore toutes les notions ou concepts à voir avec les enfants du préscolaire, c’est pourquoi il m’a été difficile de savoir quoi observer au moment de l’entrevue. Pendant celui-ci, j’essayais d’observer les gestes et les paroles de Balthazar sans trop savoir à quoi je devais vraiment porter attention. De plus, une autre difficulté était de rester neutre. Cette tâche était ardue, car j’ai l’habitude de vouloir encourager avec enthousiasme un enfant qui réussit. De même que lorsque Balthazar semblait avoir une difficulté, je me retenais fermement à ne pas intervenir. Ensuite, je remarque que j’aurais dû poser plus de questions, car j’ai posé les deux premières questions très rapidement. En prenant plus de temps en début d’entrevue, j’aurais pu vraiment bien définir le domaine numérique de Balthazar et mieux évaluer ses connaissances de base en mathématique. Cela aurait été bénéfique pour le reste de l’entrevue.
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